LONG SOLDIER Layli | Attendu que

Coup-de-cœur de Jean AZAREL pour Attendu que de Layli LONG SOLDIER
DISSONANCES #42

Laily Long Soldier, jeune poétesse artiste sioux oglala signe avec Attendu que une première œuvre ardemment traduite par Béatrice Machet. Elle y expose d’abord ses « préoccupations » : l’enfance, l’amour, la maternité, l’absence, le vécu quotidien d’un peuple colonisé qui a dû s’adapter pour ne pas disparaître. « Sur la route de Shiprock je compte huit diables de poussière tous tourbillonnant simultanément tous proches les uns des autres, alignés. Puis seulement sept. Qu’est ce qui dans ce cas est la cause de la réduction ? » Ici, le verbe transcende l’histoire indienne en lumière torche et le poème se fait galop et signaux de fumée pour nous rappeler que les êtres humains ne sont pas tous égaux en droit, si aux quatre coins de la planète leur enveloppe charnelle se ressemble. La seconde partie est une réponse cinglante et ironique à la résolution du Congrès de 2009, pompeusement qualifiée de « réconciliation historique » et formulant en anglais les excuses du gouvernement américain aux Indiens : «  Attendu qu’âgée de quatre ans, n’étant pas chrétienne, je lisais à haute voix le premier chapitre de la Bible. Attendu que mes cheveux dénattés couraient le long de ma colonne vertébrale je m’asseyais parfois dessus.  » Comment écrire dans la langue de l’occupant quand la sienne a été interdite et que le mot « excuse » n’existe pas en langue indienne ? Layli Long Soldier donne la réponse dans ce livre empreint d’une dignité aux flamboyances rugueuses et qui bêche le sillon de l’insoumission poétique. « Attendu que, je m’en souviens, les abstractions telles que vie, liberté, et bonheur, ne servent que rarement, je l’ai appris, un poème, mieux vaut ne pas convoquer ces termes.  »

traduit de l’américain par Béatrice MACHET
éd.
Isabelle Sauvage, 2020
120 pages
24 euros