DISSO #18 : Hubert HADDAD

Extrait de l’entretien avec Hubert HADDAD publié dans DISSONANCES #18

    Hubert HADDAD (petit)

Écrivez-vous plutôt « pour » ou « contre », « dans » ou « hors », « malgré » ou « à propos de » ?
J’ai longtemps été contre, hors et malgré, dans l’écriture, à mes débuts : nous étions réfractaires à la saine réalité publique, assez proches du surréalisme, et plus encore du Grand Jeu, mes amis et moi. À vingt ans, on publiait une revue, Le Point d’être, où Artaud et Rodanski donnaient le ton. On collaborait à l’Internationale hallucinex (au Soleil noir) ou aux cahiers Exils de Dominique de Roux. On risquait sa vie à force d’expédients, les yeux collés aux gouffres, aux fissures, au « Grand loin », pour reprendre le titre du dernier roman paru du cher Pascal Garnier, mort hier. Puis je me suis évadé d’une forme de suicide permanent pour rêver la durée, pour voyager, surtout pour échapper à la tragédie qui m’encerclait. Le temps aura poli nos armes sans nous apaiser. L’action au sens large et l’écriture sont tellement liées.

Quelle est la part de la contrainte dans votre écriture ?
Le sujet tant récrié et son dépassement. Le roman doit prendre des formes nouvelles pour perdurer : il est sa perpétuelle réinvention. Voilà une contrainte paradoxale : ne pas retomber dans le même jeu fixe d’asservissements au genre, lorsqu’il s’agit de fiction du moins. Quant au sujet, c’est pour moi une sorte de vertige dans lequel il faut se maintenir coûte que coûte.

Que faites-vous quand vous n’écrivez pas ?
Je lis surtout, j’aimerais peindre et dessiner davantage. Je voyage. Je rêve à tous les livres que je n’aurais jamais le temps d’écrire.

Qui est votre premier lecteur ?
Mon éditeur.

Qu’est-ce qu’un bon éditeur ?
C’est d’abord quelqu’un qui vous lit avec pénétration et perspicacité, dans une perspective ouverte, qui prenne en compte l’œuvre en cours dans son déploiement, quitte à mettre le doigt sur telle faiblesse ou telle contradiction, c’est en conséquence quelqu’un qui vous publiera avec un enthousiasme réfléchi, sans réticence d’aucun ordre, et rendra efficientes toutes les promesses contractuelles pour que l’œuvre en question puisse s’incarner au mieux.

Que diriez-vous à un auteur cherchant son premier éditeur ?
De lire ce qui se publie chez tel ou tel avant de coller son timbre. Même si on se rêve unique, il y a des familles d’esprits, des courants de sensibilité.

Quelle fut votre première grande émotion de lecteur ?
La découverte des poètes à quinze ans : Baudelaire, Rimbaud, Mallarmé, Apollinaire, Milosz, etc.

Que faut-il lire de vous ?
Au choix, il y a pas mal de titres. Le dernier en date étant…

…suite de l’entretien dans la version papier de DISSONANCES #18

BIO

Né à Tunis en 1947, Hubert Haddad a passé son enfance – évoquée dans Le  camp du bandit mauresque (éd. Fayard, 2005) – dans les banlieues populaires de la région parisienne. À peine sorti de l’adolescence, il fonde la revue Le point d’être dans la lignée du surréalisme. Son premier recueil de poèmes, Le charnier déductif, paraît en 1967. Il publie son premier roman, Un rêve de glace, en 1974 chez Albin Michel (réédition par Zulma en 2005). Depuis, il alterne la publication de romans, de nouvelles, d’essais sur l’art ou la littérature, de pièces de théâtre et de recueils de poésie.