AUTRÉAUX Patrick | Pussyboy

Coup-de-cœur de Jean-Marc FLAPP pour Pussyboy de Patrick AUTRÉAUX
DISSONANCES #44

Ç’aurait pu n’être que le récit (rencontre, montée, descente) d’une liaison charnelle entre deux jeunes hommes, et rien que ça sans doute (qui quoique devenu relativement courant reste minoritaire dans le champ littéraire) aurait peut-être suffi à faire que Pussyboy mérite l’attention, mais c’est évidemment (sinon ici au moins on n’en parlerait pas) beaucoup plus que cela. Car cette narration d’une histoire d’amour à haute teneur sexuelle mais qui « ne fut pas l’amour et n’aura pas été seulement le sexe » nous emmène très loin, mettant en évidence dans sa complexité l’alchimie des rapports entre pudeur, jouissance, désir et frustration, pouvoir et dépendance, don de soi, possession, décalages sociaux, culturels, religieux (et autres ingrédients de l’extase amoureuse quand le libertinage se transforme en passion), fusionnant pour ce faire fulgurances poétiques et pure pornographie (« Une fois il se féconde la main en se retirant in extremis de ma bouche. Une deuxième lui engrenaille le ventre. La troisième giclée me pollocke le dos. »), émaillant son propos de citations parfaites tant dans leur concision que dans leur pertinence et leur diversité (Lou Reed, Lacan, Racine, le Coran, Rohff, Artaud…), et plus que tout peut-être disant splendidement tout ce que le plaisir doit à la confusion des genres et des sensations (« Et les mains qui se posent, les clés du corps qui deviennent des hérissons très doux, des coraux mous, des étoiles à tentacules, un bourgeon gluant ») car puisant à la source de l’expérience ultime d’un voyage au-delà de toutes les morales, de toutes les censures, « là où coïncident douleur et joie d’être enfin un corps qui ne se retient pas d’exister. »

éd. Verdier, 2021
128 pages
14 €

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