DISSONANCES #39 | MUTATIONS
Combattre la nuit
« C’est elle qui vous fait le plus peur. Parce que la nuit ne sait pas. Elle est le regard aveugle. La nuit c’est la paupière et dessous vous ne savez pas. C’est comme si votre mère partout autour et qu’elle fermait les yeux pour ne pas vous voir boire fumer et pleurer et fréquenter les hommes qui se détachent de l’ombre comme de grands couteaux prêts à vous fendre et vous qui glissez le long de leur lame parce que vous cherchez le tranchant. Le tranchant après l’ivresse dans votre bouche pleine de tabac froid. Une mauvaise gentille fille. Avec des larmes sous la peau qui ne demandent qu’à sortir si l’un voulait bien vous trancher un peu là. Ici. Encore. Viens chéri. Là.
Il faut combattre la nuit par l’encre qui est aussi noire mais qui dit ce qu’il y a sous la paupière et fait le jour. Oui elle rend la lumière et alors vous n’avez plus p-l-eur.
Il faut combattre la nuit et s’y prendre dès le jour, parce que la nuit n’attend pas. En hiver elle arrive dès l’après-midi comme ça d’abord on pense que ce sont les toits en inox qui se désagrègent dans l’horizon parisien à cause d’un ciel qui ne cesse d’être mouillé et que tout ça fait un buvard gris mais non : c’est déjà la nuit qui commence. Le temps de… »