GUYOT Amélie (extraits)

DISSONANCES #35 | LA HONTE
Chamaille de nerfs
« On se réveille. On se maintient dans un semi sommeil.
On a ressassé la nuit aux heures creuses. Revu les cotillons pelotonnés
en petits tas piétinés sur le lino sirupeux et les joutes verbales
où l’on perd plumes et célérité.
Ce matin dans la tête ça sent l’alcool frelaté et la punaise écrasée.
Une pièce où on ne laisse entrer ni la lumière ni les visiteurs. Là-dedans
ça pue le manque de contact et les débris amassés. Toutes ces choses
qui encombrent le corps. L’humidité où tout est bile guette le nez.
Dès huit heures pelures d’oignon dans les yeux. On entre en eau.
L’âme est à l’état liquide. Restreinte.
À l’intérieur tout fait pelote. Un maillage spongieux de sourires ironiques
monte à la gorge. Enflamme la thyroïde. On se souvient… »

DISSONANCES #31 | DÉSORDRES
Les engrenages asymétriques
« j’aimerais tourner le dos à l’insécurité des programmes comme aux mandats divers, narguer les enclosures techniques nichées sous la langue de la gouvernementalité moderne, coulée du deuil assumé de la pensée, de la déduction, de la décision, poissée de lieux désaffectés, de zones expropriées, de mots vides ou creux, de promesses accumulées et méprisées, à la fois effrayantes et ridicules, rappelant la vanité de la condition humaine, martelant l’hégémonie des dominations, la toute puissance des chocs disruptifs, comme le flot ininterrompu d’événements improbables, irréversibles et extrêmes qui se multiplient et se combinent de manière inattendue, quoique prévisibles, enrayant la machine à confiance, dynamitant l’organe central, réduisant la portée du collectif par une suite improbable d’actions et de réactions ineptes, de causes et d’effets ubuesques, de vacuité de syntagmes à tailler, à polir, à hurler, desquels on pourrait rire si le coeur y était, desquels on pourrait s’esclaffer à tout moment, surtout aux heures intermédiaires, celles des jointures et des lisières, de l’entre deux, ni jour ni nuit, celles de l’accord possible entre ce qui se lève et s’achève, du 3 huit au levain des boulangeries, les... »