DUMORTIER David | Au milieu d’Amman

Coup-de-coeur de Romain PARIS pour Au milieu d’Amman de David DUMORTIER
DISSONANCES #35

J’imagine volontiers qu’Au milieu d’Amman trône au fond d’un café obscur des faubourgs d’Inde ou d’Afrique. Dans le coffre à outils d’un mécano. À la fenêtre d’une cahute de la Baie d’Hudson. N’importe où. Tant que la Routine s’y ouvre à un Rêve Éveillé. Que le Temps s’y fige. Amman. Ces villes comme Amman, « On peut les aborder sans être bien habillé, sans être des menteurs sur nous-mêmes, elles ne nous obligent pas à nous vanter, à nous inventer une vie que l’on n’a pas connue ». Peu de mots suffisent à David Dumortier pour décrire des atmosphères, des endroits, ou les anti-évènements du quotidien. Pour croquer le portrait des citadins. Nous faire connaître quelqu’un – en profondeur – en le confrontant à une situation – ordinaire. Bref. «  Il est si beau que même si je lui donnais tout l’or de la reine de Saba il serait encore mendiant » et ça suffit pour faire vibrer – lettre après lettre – l’Horizon d’Amman. De la même façon, l’aridité réfractaire du site contribue à octroyer un éclat d’Éternité au moindre détail. Par contre, n’oublions pas que les cerfs-volants, les moineaux et les jets qui saturent le zénith ne font qu’enfiévrer davantage encore la quiétude ancestrale de Djebel Jaufa ou Asrafia. Enfin, si Amman fait mine d’être rébarbative, elle est en fait comme Ahmed, qui, au moment de frapper, «  a cicatrisé cet instant par un sourire ». Amman. Le Tintamarre des klaxons a englouti la zizanie de son Histoire Antédiluvienne. Et si les Mille et Une Nuits se cachent le long des Ruines en friche, elles le font bien : une Tempête de Sable a réuni – croirait-on – toute une Humanité au cœur des Montagnes d’Amman. Qui ouvrira ce livre, partira à sa rencontre.

éd. Al Manar, 2008
49 pages
10 €