SAGALOVITSCH Laurent | Véra Kaplan

Coup-de-coeur de Sophie WESTENDORP pour Véra Kaplan de Laurent SAGALOVITSCH
DISSONANCES #32

Alors qu’il vient passer quelques jours à Tel-Aviv dans l’appartement de sa mère décédée, un homme reçoit un courrier en provenance d’Allemagne. Les confidences posthumes d’une grand-mère – Vera Kaplan – dont il ignorait tout. Quelques pages qui éclairent le tabou qui l’entourait : Vera a pactisé avec les nazis et traqué d’autres Juifs pour sauver sa propre vie. À travers deux cahiers – son journal de guerre mais aussi sa relecture a posteriori des événements – Vera raconte sa volonté farouche de sauver les siens, puis juste de se sauver elle-même. Mais aussi sa colère face à la résignation et à l’apathie de ses semblables. « Ils n’avaient plus rien à perdre, ils ne pouvaient plus rien espérer, et pourtant, semaine après semaine, jour après jour, heure après heure, je les voyais se dépêcher de grimper dans ces camions, se laisser insulter, cracher dessus, humilier, sans que jamais personne n’ose se révolter. Et cette passivité me rendait folle. » Un roman fort et dérangeant sur la force de vie et le refus du renoncement, pour lequel l’auteur s’est inspiré du destin de Stella Goldschlag, condamnée après-guerre pour avoir dénoncé des centaines de Juifs, et qui n’a jamais tenté de s’excuser. « Je n’ai jamais minimisé le poids de mes fautes ni la gravité de mes actes. Je ne me suis jamais complue dans le déni. Si j’avais pu éviter de me comporter de la manière dont je me suis comportée, je l’aurais fait. Simplement je n’ai pas eu le choix. Et j’ai eu raison. » Le destin amoral et atypique d’une petite fille juive née à Berlin en 1922. « Dès le départ, elle n’avait aucune chance pour que son histoire se termine bien. »

éd. Buchet/Chastel, 2016
160 pages
13 €