Extrait de l’entretien avec Lambert SCHLECHTER publié dans DISSONANCES #31
Lambert SCHLECHTER (petit)
Ecrivez-vous plutôt pour ou contre, dans ou hors, malgré ou à propos de ?
J’écris égoïstement, égotistement, autistiquement pour moi. J’écris compulsivement contre l’entropie, contre le crépuscule, contre le pentu de la pente. J’écris dans la jubilation, connecté à l’immense réseau-circuit où d’autres écriveurs à travers les siècles vibrent. J’écris hors du temps et hors du monde viscéralement vissé au temps et au monde. J’écris malgré les assassins. J’écris à propos de moi et donc de l’universelle condition.
Quelle est la part de la contrainte dans votre écriture ?
La contrainte pour moi joue un rôle décisif. La plupart de mes écrits ont été produits avec la contrainte comme moteur : sans la contrainte ils n’auraient pas été écrits ̶ ou alors j’aurais écrit autre chose mais je ne sais pas quoi.
Contrainte en poésie : c’est le quatrain (en général octosyllabique) dans Le Papillon de Solutré (2003) et dans Les Repentirs de Froberger (2011), c’est le distique décasyllabique dans La Théorie de l’univers (2015), c’est le neuvain structuré en quatre distiques et un vers final dans Piéton sur la voie lactée (2012), dans Enculer la camarde (2013), dans Je est un pronom sans conséquence (2014) et dans Milliards de manières de mourir (2016) – et chaque fois 99 neuvains par recueil.
Contrainte en prose : c’est le format. Dans la plupart de mes ouvrages en prose le texte se structure strictement ou en page ou en alinéa. A l’origine, ce sont les dimensions des cahiers et carnets qui génèrent la longueur des textes qui sont toujours écrits à l’encre avant d’être typographiés.
La page, c’est, selon les livres, 1000 ou 1800 signes. Chaque page est aussi un chapitre, que ce soit dans des récits comme Angle mort (1988, 2005) ou Partances (2003) ou dans les livres à…
…suite de l’entretien dans la version papier de DISSONANCES #31
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BIO
Lambert Schlechter est né en décembre 1941 à Luxembourg. Publié dès 1960, il a ensuite patiemment construit une œuvre considérable dans tous les sens du terme, érudite, sensuelle, polymorphe, lyrique, humaniste, posée en équilibre entre poésie pure et considérations philosophiques, qui dit avant tout (sans doute) l’émerveillement et la jouissance d’être au monde. Depuis 2006, il travaille (entre autres) à l’élaboration d’un projet au long cours, Le Murmure du monde, vaste collection en expansion de fragments littéraires, philosophiques et autobiographiques. En 2015, des milliers de livres et la quasi-totalité de ses manuscrits ont disparu dans l’incendie de sa maison. Il vit aujourd’hui seul dans le vignoble de la Moselle luxembourgeoise.
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BIBLIO SÉLECTIVE (2016)
La Muse démuselée (éd. Phi, 1982)
Partances (éd. L’Escampette, 2003)
Smoky (éd. Le Temps qu’il fait, 2003)
La Robe de nudité (éd. des Vanneaux, 2008)
La Pivoine de Cervantès (éd. La part commune, 2011)
Les Repentirs de Froberger (éd. La Part des anges, 2011)
Je est un pronom sans conséquence (éd. Phi, 2014)
Le Murmure du monde :
1 Le Murmure du monde (éd. Le Castor astral, 2006)
2 La Trame des jours (éd. des Vanneaux, 2010)
3 Le Fracas des nuages (éd. Le Castor astral, 2013)
4 Inévitables bifurcations (éd. Les Doigts dans la prose, 2016)
5 Le Ressac du temps (éd. des Vanneaux, 2016)