DISSONANCES #21 | LE VIDE
Semper eadem
« Et je me plais à imaginer ce que ce sera après et ce qu’on pourra devenir quand tu auras fini d’attendre et que j’aurais fini d’espérer. Quand je serai enfin tienne et que je pourrai t’aimer en toute liberté. Et on pourra se le dire. Et on sera bien. Et ça sera bien.
Revivre encore ce qui accule à la vanité tout le savoir du monde. La vie qui défie les livres. Toute connaissance, toute science, toute expérience balayées par une promesse de félicité. La raison se réveillera avec le temps, mais trop tard, on l’aura vécu avant ce souffle dérisoire. L’absurdité de tout recommencer. Encore et encore. Ad libitum. Comme si l’amour restaurait notre virginité dans l’oubli et que ce désir d’éternité prenait sa source naturelle dans le Léthé, alors qu’il ne s’agit que de l’ultime répétition d’une pièce mécaniquement huilée, en mouvement perpétuel et en inertie totale, où seule la distribution a changé, enfin toi. Comme si c’était inouï, inédit et original, cet amour fou béat des premiers mois soutenus par l’excitation où l’on peut se vautrer uniquement dans le luxe de ne rien faire, l’inactivité et l’inanité la plus totale, juste parce qu’on est deux. Et tout sera neuf. Et tout sera... »