BRIEND Xavier (extraits)

DISSONANCES #48 | FÉERIES
Féeries pour une autre foi
« On a été séquestrés sur le Tuc de Pan par des bergers pyrénéens qui nous obligeaient à contempler sans possibilité d’arrêt, sauf à mettre des gouttes dans nos yeux bloqués sur les montagnes, comme ça des jours et des jours et des jours sans dormir. À la fin qui ne devait pas arriver, mes paupières ressemblaient aux nuages où je m’imaginais des visages familiers histoire de me divertir un peu.

Mais une bergère qui faisait des extras dans un bar de Saintes nous a exfiltrés quand elle a repéré dans le lointain ma carte officielle de buveur de bières belges que j’avais transformée en drapeau.

Et puis, dans le dernier train de marchandises de Rungis qui allait de Boutx-les-Pyrénées à Rennes, Jihane me racontait Rome depuis Romulus alors moi, en échange amoureux dans la plus pure tradition troubadourde, je lui récitais les plus beaux passages du Guide du Routard de l’année de ma naissance.

Mais le type du wagon-bar du coin hurlait en fond sonore avec… »

DISSONANCES #40 | CONFLITS
La fille sage près du buffet

« Pourtant je sens que je tremble, pas pour de vrai, pas véritablement, mais ça tremble en moi. Un vrai petit, non, mais non, c’est un grand nid d’amour ici. Je dis n’importe quoi, je m’enfonce, j’ai la résignation joyeuse. Qu’est-ce que… L’alcool, et puis les lumières qui tournoient, la musique, la foule, j’en sais rien, je m’en fous. Au loin, il y a un grand type qui danse, qui se démène tout en se marrant et c’est moi, ce type, ce serait moi qui danserais ici, qui casserais tout ici, ici, et ici aussi. Un grand nid d’amour ici ! je lui crie. Putain mais… dit-il, effrayé par mon cri ou dégoûté ou autre chose mais plus du tout souriant. Gorgée de bière. Combien ? Ou dansant dans un bar de nuit du Marais mais pourquoi, pourquoi ? Je l’aurais vue, Aude, dans ce bar. Elle serait à Paris. Elle serait à Montrouge. Non. Ne plus penser à ça, cet ancien appart, ne plus penser à hier, hein, Richard ! Ne pas penser à Aude. Fais un effort, te laisse pas aller et Richard est là, juste en face de moi, sans sourire. Je lui dis, comme s’il était plusieurs, comme s’il y avait une foule de Richard en face de moi : Regardez-moi ces beaux volumes. Ces beaux volumes, je répète, comme si je me prenais moi-même à mon jeu, que j’y croyais, aux beaux volumes. Comme si j’en… »