DISSONANCES #40 | CONFLITS
Le facteur sioux
« Au début il y a le noir, tu descends, plus loin plus profond, c’est inévitable. Dans ta tête ça s’embrouille, ça bifurque, ça trafique dans tes neurones, le trou, la cave, la chape de noir comme au tombeau, ça t’envoie le goût de la terre dans les narines, les yeux, ça pique, ça te démange, ça te donne envie de te raser les cheveux, balafrer ton visage, parler mal : gueuler, quoi. Faut voir le charbon encrassé dans tes veines qu’on t’a dit, le jus noir qui suinte à la fleur de ta peau, et puis faut voir qu’elle fout le camp ta peau, t’es malade qu’elle t’a dit. Faudrait voir ça même dans le noir. Sauf que le noir est une matière qui fond, qui dégouline, elle s’attache à toi, te colle comme à un aimant, elle rentre dans ton foie, ta rate, ton estomac, tu chies du noir, tu broies du noir, tu le pisses, tu le sens, tu le touches.
Au début tu crois que t’es au fond mais non, tes yeux se sont retournés, ils regardent de l’autre côté, à l’intérieur, le noir à l’intérieur, tu descends dans ta propre mine et c’est inexorable, t’as rien comme lampe frontale. Là-dedans t’as l’impression de voir des amibes translucides te hanter les pupilles comme des reviviscences de fantômes qui… »