DISSONANCES #20 | MAMAN
Troisième visite
« La sonnette du portail et le gong de la comtoise retentissent avec une synchronisation parfaite.
Elle est fatiguée à l’idée de leur faire faire à nouveau le tour du propriétaire, fatiguée du poids de son ventre. Elle se sent massive, horloge violon pleine d’un mouvement qu’elle ne contrôle pas.
Patrick est dans son atelier. Depuis qu’il s’est pris de passion pour les entrailles des carillons, il leur consacre soirées et week-ends.
Elle aime cette maison. La clepsydre de sa vie ici se vide avec fatalisme. Après leur mariage, ils ont emménagé dans un appartement en pierres claires et colombages, derrière le campanile ; un lieu qui a donné, au fil des saisons, tout son sens au mariage. Elle a pris la mesure de ce qu’était le quotidien avec un homme, sa rudesse, l’invariable fréquence à laquelle les vibrantes douleurs se plantent en elle comme dans une cible. Elle a compris pourquoi l’hyménée est appelé lit. Elle s’y est résignée, automate oscillant sans plaisir au rythme de l’instrument, ressort humide faisant les mêmes gestes mécaniques.
Le couple est devenu famille avec l’arrivée de… »