LE GOLVAN | Psaume des psaumes

Coup-de-coeur de David MARSAC pour Psaume des psaumes de LE GOLVAN
DISSONANCES #30

« J’écrirai lorsque physiquement les autres n’en auront plus la force. » Ce Psaume des psaumes  est de la race des grands chants, dont le plus grand dans la lignée reste à jamais « Le Roi d’Asiné  » de l’immense Séféris («  Et Asiné… Et Asiné… »). Lyrique, érudite, propitiatoire, la langue de Le Golvan se hisse à la hauteur requise pour dire le Verbe, qui est d’abord poussière avant d’être chant : « Au débit de ton nom, David, je n’ai pas démérité. » Parodique à peine, le psalmiste détaille sa passion pour un homme, un roi, un éditeur peut-être, lui-même souvent, passant de la douceur quasi érotique à l’imprécation tendre. «  David mes bras étaient comblés de toi.  » C’est aussi la longue confession d’un impossible dévouement à la cause du chant, plus grand que le poème (de ce dernier, la vie et l’amour sont aujourd’hui les restes décharnés). Face à ce lyrisme âpre (le sens très heureusement échappe et ne pourra être retenu contre son auteur), le lecteur se retrouve face au vide de son propre masque. Ce psaume énigmatique brosse aussi le portrait de l’écrivain d’aujourd’hui, qu’un rien de grâce habite, grâce qui attise sa faim autant que sa vanité, car le talent n’est rien à force d’être partagé dans l’espace à jamais contemporain de la littérature. La technique a fait de chacun d’entre nous des lecteurs habiles et des écrivains automatiques – des rois ordinaires : aussitôt nés, aussitôt achevés. Il n’y a plus de lecteurs pour les grands poèmes. Il n’y a plus de grand poème. Reste le chant. De ce chant résiduel, Le Golvan est le maître.

éd. La sirène étoilée, 2015
48 pages
12 euros