CARRAR Xavier | Erreur 404

Coup-de-coeur d’Isabelle GUILLOTEAU pour Erreur 404 de Xavier CARRAR
DISSONANCES #28 

erreur

Huit lycéens d’une cité X. Ils croient voir « un arbre qui marche, en feu ». Leur prof vient de s’immoler en leur « envoyant des bisous » sans autre mot que «  c’est pour vous ». Tandis qu’ils se questionnent sur cet acte, on annonce l’immolation d’un jeune au Maghreb. Le texte, ponctué par la radio, les retours de Mme L et le leitmotiv « We are deeply concerned », superpose l’embrasement du monde arabe au sacrifice de la prof, la révolte d’une jeunesse au fatalisme d’une autre. Les adolescents évoquent tour à tour avec lucidité, humour et désenchantement leur avenir, le rôle de l’école (« Qui va nous sauver ? Quand même les profs trouvent pas d’autres solutions que de se cramer ? »), la cité, l’intégration (« Pour mieux s’intégrer faut commencer par avoir honte »), les rêves des parents. Tantôt les voix muent en un florilège choral de discours politiques nauséabonds (karcher, bruit et odeur), tantôt elles se suspendent aux désillusions de la prof sur l’école qui exclut, la société qui étouffe. C’est finalement le devoir de révolution évoqué par la radio qui va éveiller leurs consciences : « Là bas y a un frère qui se crame et ça provoque une révolution. Nous on chiale. On fait une petite marche blanche et on lance des ballons ». Des mots pour nourrir la révolte en germe, pour donner sens aux derniers mots, au geste ultime de Mme L – exister par l’insoumission : « Finie la becquée. Ce n’est plus à moi de dire. C’est à vous d’agir. Soyez enragés ».
Texte théâtral haletant, Erreur 404 fait entendre les voix bouleversantes d’une enseignante et d’une jeunesse à bout de rêves et d’avenir.

Lansman éd., 2014
63 pages
10 euros